La boîte vient de mon père. Il était formateur pour des futurs électriciens, et il y rangeait du matériel pédagogique. Ma mère avait récupéré une de ses boîtes à couvercle coulissant pour y mettre ses boutons. Quand je suis née, cette boîte faisait déjà partie de la maison. Et comme beaucoup d’entre nous, j’ai énormément joué avec son contenu.
Quand je suis partie de la maison, ma mère a prélevé une partie des boutons de la boîte pour s’en constituer une nouvelle, et elle m’a donné cette boîte. Je me souviens être très émue qu’elle choisisse de me confier la boîte en question, et non de me donner l’échantillon dans une nouvelle boîte sans histoire. Nous n’avons pas l’habitude d’exprimer nos émotions dans cette famille, alors cette transmission a eu une haute valeur symbolique !
Aujourd’hui, bien que je fasse un peu de couture, je sais que je n’utiliserai qu’une toute petite portion des boutons de cette boîte. Pourtant, je la remplis consciencieusement avec chaque bouton que je peux récupérer sur les habits neufs lorsqu’ils sont fournis avec des boutons de remplacement, je récupère aussi chaque bouton des habits devenus inutilisables. Je vais ramasser un bouton tombé par terre dans la rue pour le confier au bon soin de la boîte. On dirait que je cultive un levain, une pâte peine de vie mais qui a besoin d’être nourrie régulièrement pour rester vivante, et qui peut se transmettre comme on bouture une plante.
Ma fille a eu 19 ans cette année, on dirait bien qu’à mon tour je vais devoir me chercher une nouvelle boîte !
Journées du Matrimoine – Boîte à boutons de Claire Deslorieux